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Tupi or not tupi

LÍVIA MELZI
Du 19/10/2022 au 27/11/2022

Lívia Melzi propose une enquête visuelle sur la représentation occidentale de capes Tupinambá, issues des tribus guerrières Tupi de la côte brésilienne et utilisées à l’origine pour des rituels anthropophages. L’artiste met en lumière les discours construits autour de ces artefacts conservés aujourd’hui dans des musées européens, tout en faisant se rencontrer arts de la table français, récits de voyage coloniaux et anthropophagie culturelle.

Lívia Melzi travaille l’archive, la mémoire et la construction de l’identité à partir de représentations quasi-documentaires. Elle interroge également de manière critique la production, la conservation et la circulation des images dans l’écriture de l’Histoire. Ses différents projets, de la figure méconnue d’Hercule Florence (pionnier de la photographie au Brésil) à l’enrichissement des collections dans les musées européens, s’intéressent aux perceptions héritées de l’époque coloniale.

 

Lívia Melzi en collaboration avec Glicéria Tupinambá, Autoportrait, 2022, photographie. Courtesy des artistes

L’artiste brésilienne initie en 2018 une recherche sur les capes Tupinambá, issues des tribus guerrières Tupi largement décimées lors des premiers contacts avec les Européens au XVIe siècle. Leurs descendant·es vivent aujourd’hui dans les forêts tropicales menacées d’Amazonie et sur la côte atlantique du Brésil. De ces capes, utilisées initialement pour des rituels anthropophages et importées en Europe au XVIIe siècle, ne restent plus que huit exemplaires, conservés dans plusieurs musées européens dont celui du Quai Branly à Paris. Lívia Melzi documente par la photographie les dispositifs muséologiques et les discours dédiés à ces tenues, sécularisées derrière des vitrines ou dans des réserves.

À partir de cette recherche, son projet au Palais de Tokyo s’est d’abord développé au printemps 2022 dans le séminaire « Autochtonie, hybridité, anthropophagie (II) », conçu en partenariat avec l’École normale supérieure (Paris). Elle y est intervenue en dialogue avec Eduardo Jorge de Oliveira (professeur en études brésiliennes à l’Université de Zurich). L’artiste a réuni ensuite pour son exposition à l’automne 2022 un ensemble d’œuvres récentes et inédites : deux photographies de capes Tupinambá, parlant de conservation et de restitution ; sa toute première vidéo, réalisée en collaboration avec l’Ambassade du Brésil à Paris ; ainsi qu’un ensemble de tapisseries inspirées de gravures du XVIe siècle qui dépeignaient les autochtones comme des guerriers barbares, dangereux et cannibales tout en leur prêtant des traits européens.

 

Alors qu’est célébré cette année le centenaire de la « Semaine d’Art Moderne », manifestation littéraire et artistique à l’origine du modernisme brésilien, le titre de cette exposition est inspiré par le Manifeste anthropophage d’Oswald de Andrade, publié en 1928 dans son sillage. Dans ce texte à la fois poétique, philosophique et politique, l’auteur écrit notamment : « Tupi or not tupi, that is the question ». Cette citation emblématique (en anglais dans l’original), est autant une célébration des Tupinambá et de leurs pratiques rituelles qu’un exemple métaphorique de cannibalisme : le texte incorpore Shakespeare avec cette référence à la célèbre tirade d’Hamlet, « To be or not to be ».

Du 19/10/2022 au 27/11/2022

Commissaire Daria de Beauvais

Assistante curatoriale Lisa Colin

Lauréate du Grand Prix du 65e Salon de Montrouge